Léda - L'étude des animaux

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Mouette

1707 - 1788 - Comte de Buffon - Histoire naturelle Tome 23 - Les goélands et les mouettes [extrait]

[...] Et pour établir un terme de comparaison dans cette échelle de grandeur, nous prendrons pour goélands tous ceux de ces oiseaux dont la taille surpasse celle du canard, et qui ont dix-huit ou vingt pouces de la pointe du bec à l’extrémité de la queue, et nous appellerons mouettes tous ceux qui sont au-dessous de ces dimensions; il résultera de cette division, que la sixième espèce donnée par M. Brisson, sous la dénomination de première mouette, doit être mise au nombre des goélands, et que plusieurs des goélands de Linnæus ne seront que des mouettes; mais avant que d’entrer dans cette distinction des espèces, nous indiquerons les caractères généraux et les habitudes communes au genre entier des uns et des autres.

Tous ces oiseaux goélands et mouettes, sont également voraces et criards; on peut dire que ce sont les vautours de la mer; ils la nettoient des cadavres de toute espèce qui flottent à sa surface, ou qui sont rejetés sur les rivages; aussi lâches que gourmands, ils n’attaquent que les animaux faibles, et ne s’acharnent que sur les corps morts. Leur port ignoble, leurs cris importuns, leur bec tranchant et crochu, présentent les images désagréables d’oiseaux sanguinaires et bassement cruels; aussi les voit-on se battre avec acharnement entre eux pour la curée, et même lorsqu’ils sont renfermés et que la captivité aigrit encore leur humeur féroce, ils se blessent sans motif apparent, et le premier dont le sang coule devient la victime des autres, car alors leur fureur s’accroît et ils mettent en pièces le malheureux qu’ils avaient blessé sans raison; cet excès de cruauté ne se manifeste guère que dans les grandes espèces; mais toutes, grandes et petites, étant en liberté, s’épient, se guettent sans cesse pour se piller et se dérober réciproquement la nourriture ou la proie: tout convient à leur voracité; le poisson frais ou gâté, la chair sanglante, récente ou corrompue, les écailles, les os même, tout se digère et se consume dans leur estomach ; ils avalent l’amorce et l’hameçon; ils se précipitent avec tant de violence, qu’ils s’enferrent eux-mêmes sur une pointe que le pêcheur place sous le hareng ou la pélamide qu’il leur offre en appât, et cette manière n’est pas la seule dont on puisse les leurer; Oppien a écrit qu’il suffit d’une planche peinte de quelques figures de poisson, pour que ces oiseaux viennent se briser contre; mais ces portraits de poissons devaient donc être aussi parfaits que ceux des raisins de Parrhasius! [...]


Mouette Dresser jpg
Mouette blanche - Dresser - HBE - Source

1881 - 1924 - Alphonse Beauregard
La Mouette

Aux coups de feu la mouette
N'a pas changé de chemin,
Et sa brune silhouette
Sur le ciel rose et carmin
Se découpe nette.

Par le seul appui du vent
Majestueuse elle plane,
Puis doucement, doucement,
Dans la brume diaphane
S'incline en avant :

Et glisse de telle sorte,
Qu'elle va choir où l'on voit
L'horizon fermer sa porte.
Elle baisse, baisse et choit.
La mouette est morte.

1844 - 1896 - Paul Verlaine

Je ne sais pourquoi
Mon esprit amer
D’une aile inquiète et folle vole sur la mer.
Tout ce qui m’est cher,
D’une aile d’effroi
Mon amour le couve au ras des flots. Pourquoi, pourquoi ?

Mouette à l’essor mélancolique,
Elle suit la vague, ma pensée,
À tous les vents du ciel balancée,
Et biaisant quand la marée oblique,
Mouette à l’essor mélancolique.

Ivre de soleil
Et de liberté,
Un instinct la guide à travers cette immensité.
La brise d’été
Sur le flot vermeil
Doucement la porte en un tiède demi-sommeil.

Parfois si tristement elle crie
Qu’elle alarme au loin le pilote,
Puis au gré du vent se livre et flotte
Et plonge, et l’aile toute meurtrie
Revole, et puis si tristement crie !

Je ne sais pourquoi
Mon esprit amer
D’une aile inquiète et folle vole sur la mer.
Tout ce qui m’est cher,
D’une aile d’effroi
Mon amour le couve au ras des flots. Pourquoi, pourquoi ?